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Ils étaient venus d’Allemagne, de la Poméranie, d’Autriche, de la Galicie, de Pologne, de Hongrie, de Tchécoslovaquie, d’Ukraine, la Biélo-Russie, la Russie, de Crimée, de Lettonie, de Lituanie, la Sibérie et même de Grèce. La plupart étaient juifs.
Déportation : des artistes témoignent. Soixante ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale et la libération des camps de concentration par les Russes et les Américains, le musée du Montparnasse rejoint les célébrations nationales, en présentant une exposition exceptionnelle d’environ 150 œuvres et de nombreux documents originaux, en hommage aux nombreux artistes victimes des déportations, des ghettos et de la clandestinité entre 1941 et 1945 et dont la vie et le travail sont intimement liés à la grande aventure artistique et historique de Montparnasse (116 artistes). Bien avant que l’on ne prononce le mot Europe dans un hémicycle et qu’elle ne prenne la dimension politique actuelle, les artistes de Montparnasse l’avaient déjà inventée depuis le début du vingtième siècle. Ils étaient venus d’Allemagne, de la Poméranie, d’Autriche, de la Galicie, de Pologne, de Hongrie, de Tchécoslovaquie, d’Ukraine, la Biélo-Russie, la Russie, de Crimée, de Lettonie, de Lituanie, la Sibérie et même de Grèce. La plupart étaient juifs. Ils avaient été des centaines à avoir quitté leurs pays d’origine attirés par Paris, capitale des arts, foyer de tous les possibles et patrie d’adoption. Entre 1900 et 1930, à Montparnasse, les échanges entre les pays d’Europe de l’Ouest et de l’Est, ouverts eux-mêmes au reste du monde, avaient érigé tout le quartier en carrefour total. L’art et la culture y étaient représentés par des artistes étrangers mêlés aux artistes français au sein de l’École de Paris, tous ayant choisi Paris (après avoir pour la plupart étudié dans les écoles des Beaux-Arts d’Europe centrale) et y poursuivre leur apprentissage ; les jeunes artistes juifs russes, tel Soutine, n’avaient pu, en raison, en Russie, du numérus clausus intégrer les école de leur pays. Ils admiraient Renoir, Rembrandt, Cézanne et trouvaient à Paris, à Montparnasse plus particulièrement, un terrain d’investigation, un lieu cosmopolite d’échanges et de construction si intenses et fructueux que l’histoire des avant-gardes culturelles du vingtième siècle ne serait pas ce qu’elle est sans le Montparnasse européen des années folles. Avec Modigliani, Picasso, Derain, Vlaminck, Apollinaire, Diego Rivera ou Brancusi, ils avaient, certains dans la discrétion, contribué à la richesse et à la réputation avant-gardiste du quartier de Montparnasse, entre les deux guerres. C’est-à-dire de ces années exceptionnellement riches pour la peinture, la sculpture, la littérature, le théâtre ou la poésie, révolutionnant la pensée académique et promouvant la pensée moderne, dont le vingt et unième siècle n’est que le prolongement. L’exposition retrace le parcours individuel de plus de 100 artistes juifs disparus en déportation et d’artistes déportés rescapés qui n’ont cessé de peindre, auxquels s’ajoutent Jean Moulin, le poète Robert Desnos, Violette Rougier Le Cocq, Hans Bellmer, Zoran Music et Max Ernst, artistes résistants anti nazi. La majorité de ces artistes ont été retrouvés entre 1945 et 1951 par Hersch Fenster ; d’autres ont été retrouvés depuis. Qui était Hersch Fenster ? Critique d’art, il était l’intime des artistes et entreprit dès 1945 de rassembler des documents. Il enquête au camp d’internement de Drancy, rend visite aux familles rescapées, les questionne, retourne sur les lieux d’arrestations, interroge les concierges d’immeuble, consulte avec beaucoup de difficulté les fichiers de la Préfecture de police. Son livre, préfacé par Marc Chagall, est intitulé "Nos Artistes Martyrs", écrit en yiddish et publié à compte d’auteur en 1951. Les informations de cet ouvrage (traduites par Paul Fogel, mathématicien yiddishiste) nous permirent de rédiger les biographies du catalogue de l’exposition complétées par les témoignages de familles d’artistes, récits d’artistes survivants, de proches et de collectionneurs qui ont favorisé le prêt d’œuvres rares. De nombreux ateliers ayant disparu, 56 artistes ne sont représentés que par une biographie, une photographie, ou un document en vitrine. Les caractéristiques communes à ces artistes Au travers de leurs expressions artistiques, quoique très personnelles et donc diverses, on retrouve chez les artistes étrangers et juifs de l’Ecole de Paris, les influences culturelles de leur pays d’origine, auxquelles s’ajoutent celles des grands maîtres de la peinture ancienne (étudiés au Louvre), Le Titien ou Chardin, et impressionnistes (vus dans les Salons de peinture), Cézanne, Degas, Renoir ou Gauguin. Une mélancolie alliée à une grande poésie des « choses simples » caractérisent le travail des artistes de l’Ecole de Paris. D’autres, par contre, la minorité, s’échappent à l’avant-garde vers des territoires métaphysiques ou abstraits, se détachant du contexte d’Ecole de Paris pour rejoindre d’autres mouvements. Quelques artistes exposés :
C’est la première exposition consacrée en France à ce sujet : MUSEE DU MONTPARNASSE
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