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Pour sa quinzième édition, le Cinéma en plein air fait redécouvrir en trente soirées les plus grands succès publics du festival : Scarface de Brian de Palma, Pulp Fiction de Quentin Tarantino, Les Liaisons dangereuses de Stephen Frears, Jules et Jim de François Truffaut...et Le hérisson dans le brouillard de Youri Norstein !
Une certaine façon de rendre hommage à son public fidèle. Et pour fêter dignement cet anniversaire, parallèlement à ces trente soirées, une soirée spéciale est organisée chaque samedi. CINÉMA EN PLEIN AIR 2005 GRATUIT : C’est devenu un classique de l’été parisien, on s’y donne rendez-vous pour pique-niquer. Sur l’immense plage verte douce comme un gazon anglais, l’ambiance est toujours détendue : on échange, on fait connaissance, on attend la magie de l’écran. Le plus grand d’Europe dit-on, qui majestueusement se gonfle et se pare de couleurs. Les derniers arrivés se cherchent dans la foule bon enfant, entre transats et couvertures. Du crayon à la souris :
Youri Norstein Autobiographie Dans mon enfance, alors que j’étais gravement malade, je faisais toujours le même rêve. C’était comme si, dans l’obscurité, se dressait, en un épais parallélépipède, une pile de papier extrêmement fin d’environ un mètre de haut. Je dois avec rapidité et précision transporter toute cette pile de papier, feuille par feuille, en un autre lieu. Je m’efforce de le faire le plus rapidement possible mais la pile ne diminue pas d’un seul feuillet et l’autre n’augmente pratiquement pas non plus. Plus tard, alors que je faisais du dessin animé, je suis plus d’une fois revenu à ce rêve d’enfant en travaillant à un de ces calques sur lesquels étaient dessinés les mouvements. Je suis né en 1941, le 15 septembre, dans le village de Andreievka qui se trouve dans la région de Penza, l’un des lieux d’évacuation au tout début de la guerre. En 1943, nous sommes revenus à Moscou avec ma mère et mon frère aîné. Ma mère, Bassia Guirchevna Kritehevskaia, a travaillé toute sa vie dans des établissements destinés à la petite enfance : des crèches, des jardins d’enfants, à la halte-garderie de la gare. Mon père, Berco Leibovitch Norstein, était ajusteur dans l’industrie du bois. Il mourut quand j’avais 14 ans. Je n’ai pas eu le temps de le connaître vraiment. Selon ce qu’on m’en a dit, c’était une personnalité intéressante. Alors qu’il n’avait reçu aucune formation, il s’intéressait aux mathématiques de haut niveau, possédait l’oreille absolue ainsi qu’une mémoire musicale extraordinaire. Il sifflait par cœur des airs de Wagner et Schubert. Je pense que mon frère aîné, qui étudia la musique et devint par la suite restaurateur de violon, a hérité des talents de notre père. Ma mère n’avait pas d’aptitude particulière mais faisait bien la cuisine et défendait ses enfants des horreurs de la vie. On me rappelait sans cesse mes origines juives. J’ai fait mes études secondaires et, durant les deux dernières années, j’ai suivi parallèlement les cours de l’École d’Art où étudiait Franceska Yarbousova, qui devait devenir plus tard mon épouse. J’ai travaillé dans une usine de meubles. En 1959, j’ai entrepris un cycle de deux années d’études de peintre-animateur au Studio de cinéma "Soyouzmoultfilm" où j’ai commencé à travailler en 1961. Bien que j’y aie rencontré un grand nombre de metteurs en scène célèbres comme Tsekhanovski, Khitrouk, Atamanov, Katchanov, Ivanov-Vano, Dejkine, Poikovnikov et beaucoup d’autres, ma soif de quitter le Studio n’avait d’égale que mon aversion pour le cinéma d’animation car je rêvais de faire de la peinture. Mes tentatives pour être admis dans une école de peinture se soldèrent par un échec complet. C’était comme si le destin lui-même me montrait du doigt ma place dans la vie. Les six ouvrages d’Eisenstein ont accompli leur travail de sape : je "succombai" à la mise en scène. C’est au studio que j’ai rencontré ma future épouse, Franceska Yarbousova, et le résultat de cette union fut la naissance de nos deux enfants, Boris et Katia, et la sortie des films "Le Renard et le Lièvre", "Le Héron et la Cigogne", "Le Petit Hérisson dans la brume", "Le Conte des contes"et "Le Manteau" (qui n’est pas encore terminé). J’ai eu pour professeurs les grottes d’Altamira et de Lascaux, "Le Sauveur" de Andrei Roublev, la dernière sculpture de Michel-Ange "La Pietà Rondanini", "Les Ménines" de Velâzquez, la dernière période de Goya,"Le retour du fils prodigue" de Rembrandt, Van Gogh, "Moussorgsky"de Repine, Pavel Fedotov, Chardin, Millet, l’avant-garde russe et européenne, le film de Jean Vigo "L’Atalante", l’oeuvre en six tomes d’Eisenstein. Mais les professeurs les plus extraordinaires, ce sont mes petits enfants et les enfants d’une façon générale. En observant leur ingénuité, leur sourire, leurs tendres et frêles épaules vêtues de chemisettes, on comprend que tout l’art du monde n’a de sens que si l’amour éclôt dans nos cœurs. Youri Norstein
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