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’Master Classe soviétique’ avec Staline, Jdanov, Chostakovitch et Prokofiev
Du 30 novembre au 18 décembre 2005

Staline et Jdanov, son âme damnée, parviendront-ils ― par la menace ou par la séduction ― à contraindre les deux grands compositeurs soviétiques Prokofiev et Chostakovitch à composer, selon la ligne du Parti, une musique mélodieuse, harmonieuse, agréable aux masses.

Un duel passionnant entre la dictature et la liberté de penser, entre la vérité officielle et la conviction individuelle.

1948. La paix est revenue, après des souffrances effroyables. Dans l’euphorie de la victoire, les populations soviétiques s’accordent quelques libertés avec les dogmes du marxisme-léninisme. Trop au gré de Staline. Reprise en main. D’abord de la culture.

La littérature, la poésie, la peinture sont mises au pas ; reste la musique. À la mi-janvier 1948, Staline charge Jdanov, ministre de la Police ― et de la Culture ― d’organiser un Congrès des Musiciens où seront condamnées les tendances modernistes et anti-nationales.

Dans un contexte historique impeccablement documenté, David Pownall met en scène une rencontre fictive, mais plus que vraisemblable, entre les artistes : Prokofiev et Chostakovitch, et les puissants : Staline et Jdanov.

S’y affrontent des idées essentielles : liberté de pensée, soumission au pouvoir, raison d’État...


Le Trio n°2 op. 67 (extrait) et le Concerto n°1 op. 35 (extrait) de Dimitri Chostakovitch sont interprétés par Georges Beriachvili

La leçon de musique

Dans la tourmente des purges staliniennes de 1948, les compositeurs Dimitri Chostakovitch et Serge Prokofiev sont convoqués au Kremlin par le maître absolu de l’’Union Soviétique et son âme damnée, le chef de la police, Andreï Jdanov. Les deux compositeurs ont donné dans le formalisme. C’est grave, très grave...

La partition de la pièce est écrite pour le quatuor de ces hommes qui s’affrontent sur les thèmes essentiels de la liberté de l’artiste, de son indépendance vis-à-vis du pouvoir politique, de son incapacité à rendre “utile” son œuvre.

Master Class, c’est la confrontation du pouvoir et du savoir, de la contrainte et de la liberté, du dogmatisme et de la création, de la violence et de la raison.

Les compositeurs vont tenter de défendre leur conception de la musique, de maintenir le “cap” artistique, sans pour autant payer de leur vie leur fidélité à eux-mêmes. Si l’ordre stalinien est légal, la démarche des musiciens est légitime. Ils proposent, et les autres disposent. Staline est tout puissant à contraindre les créateurs, et à leur imposer des formes rétrogrades choisies selon les critères définis par lui. Le mégalomane paranoïaque se métamorphose en professeur de musique. La leçon au piano va commencer. Il est, selon lui, utile de réhabiliter un poète du XIIème siècle ― Chota Roustavéli ―, géorgien comme lui, dont l’ode à la nature constituera le meilleur support pour un nouvel hymne populaire.

La question est : “L’artiste doit-il être un serviteur zélé du pouvoir ? Doit-il mettre son talent au service de l’idéologie qu’il défend ?”

Ce n’est pas par une attitude de révolte que les musiciens vont s’ex­traire de ce débat. Ils vont se prêter à l’expérience qui tournera à la dérision du dictateur, jusqu’à faire apparaître sa dimension grotesque et monstrueuse. Le choc frontal n’aura pas lieu. Staline obtiendra des com­positeurs l’aide qu’il souhaite. L’affrontement n’est pas physique, il est mental. Les sévices ne sont pas corporels, ils sont psychologiques. Le rire devient alors un exutoire, par lequel le spectateur peut se soustraire à la pression qui lui est imposée.

Master Class a été écrite par David Pownall en 1983, créée à Londres en 1983, représentée depuis dans un grand nombre de pays et créée en France le 11 décembre 1992. /Michel Vuillermoz et Guy Zilberstein


Le congrès des musiciens de janvier 1948

À la mi-janvier 1948, Jdanov, à la demande de Staline, organise un congrès au siège du Comité Central du Parti Communiste. Plus de soixante-dix compositeurs, chefs d’orchestres, critiques musicaux, et professeurs de musique sont priés de s’y rendre. Prokofiev, malade, n’assiste pas au congrès.

Jdanov, “guide culturel du parti”, condamne l’orientation formaliste et anti­populaire de certaines œuvres du moment, en particulier celles de Dimitri Chostakovitch et Serge Prokofiev, qui, souligne-t-il, “révèlent de façon évidente des tendances musicales antidémocra­tiques, étrangères au peuple soviétique et à ses goûts artistiques. L’esprit de cette musique fait écho à la mode bourgeoise, moderniste et américaine”. Il ajoute : “l’audition de cette musique perturbe indiscutablement les fonctions psycho­physio­logiques de l’homme”.

Jdanov préconise le retour au classique du XIXème siècle, et cite comme modèles : Moussorgski, Rimski-Korsakov et Tchaïkovski. Désormais, seule une musique gracieuse, harmonieuse et mélodieuse aura droit d’écoute.

Le 10 février 1948, un décret entérine cette nouvelle orientation et met à l’index de nombreux compositeurs, avec à leur tête Dimitri Chostakovitch et Serge Prokofiev.

La pièce de David Pownall s’inspire directement de cet épisode historique, de la vie de Staline, Jdanov, Chostakovitch et Prokofiev. Tous les éléments biographiques y sont vrais, ainsi que les événements évoqués.

Michel Vuillermoz


Sur la musique

Discours d’Andreï Jdanov devant le Congrès des Musiciens

Dans l’activité de l’Union des Compositeurs, le rôle dirigeant est joué aujourd’hui par un groupe limité de compositeurs. Il s’agit des camarades Chostakovitch, Prokofiev, Miaskovsky, Khatchatourian, Popov, Kabalevski...

Nous admettrons que ces camarades sont les principales figures dirigeantes de la tendance formaliste en musique. Et cette tendance est totalement fausse.

Nous avons affaire à une lutte très aiguë, encore que voilée en surface, entre deux tendances. L’une représente, dans la musique soviétique, une base saine, progressive, fondée sur la reconnaissance du rôle énorme joué par l’héritage classique et en particulier par les traditions de l’école musicale russe, par l’association d’un contenu idéologique élevé, de la vérité réaliste, de liens organiques avec le peuple, d’une création musicale chantante, d’une haute maîtrise professionnelle.

La deuxième tendance exprime un formalisme étranger à l’art soviétique, le rejet de l’héritage classique sous le couvert d’un faux effort vers la nouveauté, le rejet du caractère populaire de la musique, le refus de servir le peuple, cela au bénéfice des émotions étroitement individuelles d’un petit groupe d’esthètes élus.

Cette tendance remplace la musique naturelle, belle, humaine, par une musique fausse, vulgaire, parfois simplement pathologique. [...] Quel pas en arrière font nos formalistes hors de la grand route de notre histoire musicale, lorsque, sapant les bases de la vraie musique, ils composent une musique monstrueuse, factice, pénétrée d’impressions idéalistes, étrangère aux larges masses du peuple, s’adressant non à des millions de soviétiques, mais à quelques individus ou à quelques dizaines d’élus, à une “élite” ! Comme cela ressemble peu à Glinka, à Tchaïkovski, à Rimski-Korsakov, à Dargomyjski ! Eux ont su exprimer l’esprit du peuple ! Cela signifie que la tendance formaliste en musique a un caractère nettement anti-populaire. [...]

La musique qui est inintelligible au peuple lui est inutile. Les compositeurs doivent s’en prendre non au peuple mais à eux-mêmes ; ils doivent faire la critique de leur propre travail, comprendre pourquoi ils n’ont pas satisfait leur peuple, pourquoi ils n’ont pas mérité son approbation et ce qu’ils doivent faire pour qu’il les comprenne et approuve leurs œuvres. Voilà en quel sens il faut réformer votre travail.


Le témoignage de Dimitri Chostakovitch

On rassembla les compositeurs. Et ils commencèrent à se torpiller les uns les autres. Ce fut un spectacle lamentable. Ça me dégoûte de repenser à cela. Staline avait confié à Jdanov le soin de constituer une liste des “principaux criminels”. Jdanov opérait comme un bourreau expérimenté. Il dressait les compositeurs les uns contre les autres. Il est vrai qu’il n’avait pas à se donner trop de mal. Les compositeurs s’entredévoraient à qui mieux mieux. Personne ne voulait être sur la liste, car ce n’était pas une liste pour un décernement de prix, mais pour un massacre éventuel. Et les citoyens-compositeurs faisaient tout leur possible pour échapper à cette redoutable liste. En revanche, ils s’efforçaient par tous les moyens d’y fourrer leurs camarades. Exactement comme chez les truands : meurs aujourd’hui, je mourrai demain.

Donc, on a trituré cette liste dans tous les sens On inscrivait les uns, on rayait les autres. Seuls deux noms restaient immuablement aux places d’honneur : numéro un, mon nom, numéro deux, Prokofiev.

Le conseil eut lieu. On proclama la Révolution historique. Et la machine se mit en marche. Les réunions succédaient aux réunions, les séances aux séances. Et dans les siècles des siècles désormais, on ne devait plus faire qu’une musique gracieuse, harmonieuse et mélodieuse. On suggérait aussi d’accorder une attention sérieuse aux chants avec paroles. Dans la mesure où le chant sans paroles ne satisfait que les goûts de quelques individualistes esthétisants. Tout ceci s’appelait : Le Parti a sauvé l’art musical de la liquidation.

Car il en était ressorti que Chostakovitch et Prokofiev avaient voulu liquider l’art musical, mais que Staline et Jdanov ne les avaient pas laissé faire.

Du mercredi au samedi à 21:15
Le dimanche à 16:30
Réservation : 01 30 38 80 41

Théo Théâtre
2, rue Théodore Deck
75015 Paris


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